[Texte tiré d’une publication du HuffPost Québec à l’époque que Julien Cardinal était porte-parole de Québec en marche!]
En tout respect, il faut en finir avec ce fondamentalisme de l’indépendance qui divise et polarise notre nation au lieu de l’unir et de l’apaiser.
Précisons d’emblée que ce texte ne constitue en aucune façon une charge contre l’indépendance du Québec. Cette cause noble peut être une solution d’émancipation pour la nation québécoise et elle demeure incontestablement une option envisageable encore aujourd’hui. Ce texte propose plutôt de sortir du «fondamentalisme de l’indépendance» en plus de proposer une nouvelle démarche pour contrer le statu quo: l’envoi d’autonomistes à Ottawa.
Si les indépendantistes souhaitent doter le peuple québécois d’un État indépendant, il est important de réitérer qu’ils n’ont pas le monopole du nationalisme québécois.
Soyons clairs, être nationaliste, au-delà du sentiment d’appartenance, c’est défendre les intérêts de sa nation. À ce titre, il est tout à fait possible d’être à la fois nationaliste et fédéraliste. C’est d’ailleurs le souhait de M. Alexandre Taillefer lorsqu’il affirme que le Parti libéral doit retourner à ses «racines nationalistes», à l’instar de Bourassa, Ryan, Lesage, etc.
La famille des nationalistes québécois est large, incluant évidemment bon nombre d’indépendantistes. Si ceux-ci souhaitent doter le peuple québécois d’un État indépendant, il est important de réitérer qu’ils n’ont aucunement le monopole du nationalisme québécois. Malheureusement, certains indépendantistes semblent le croire, en particulier chez les «fondamentalistes de l’indépendance».
Le fondamentalisme se définit comme le refus du doute méthodologique concernant sa croyance. S’il est coutume d’appliquer ce concept à des croyances religieuses, il s’applique tout autant aux croyances idéologiques qu’à n’importe quel dogme édifié en doctrine.
Lorsqu’on fonde son nationalisme sur l’indépendance, on mélange alors les moyens avec la fin. On induit alors une logique inversée qui soumet tout type de nationalisme à l’idée d’indépendance. C’est ainsi qu’on bascule dans le fondamentalisme de l’indépendance. Une fois piégé dans cette logique, il est facile de penser qu’être contre l’indépendance, c’est être contre les intérêts de la nation. Pire, il est facile de devenir un «hooligan politique», intolérant à tout dialogue pouvant défier ses croyances. Contrairement aux indépendantistes modérés, les fondamentalistes de l’indépendance excluront le doute méthodologique même si leurs actions, au final, nuisent aux intérêts nationaux.
Ces fondamentalistes de l’indépendance à Ottawa
Parmi ces fondamentalistes se trouvent ces chevaliers de l’indépendance faisant croisade jusqu’au parlement d’Ottawa, afin d’y planter chauvinement leur croix idéologique. Verrouillés dans leurs pensées, ils se targuent de décréter qui sont les bons et les mauvais nationalistes, voire même les indépendantistes dignes et indignes de ce nom!
En tout respect, il faut en finir avec ce fondamentalisme de l’indépendance qui divise et polarise notre nation au lieu de l’unir et de l’apaiser.
L’exemple récent de M. Gilles Duceppe à l’endroit de Manon Massée de Québec solidaire illustre bien l’idée. À l’instar de notre ancien clergé, ils décident qui sont les vrais fidèles et ceux à excommunier. C’est en ce sens que la proposition de M. Boudrias d’un «seul parti souverainiste, un seul programme, une seule organisation, une seule mission » s’articulant à l’intérieur des parlements de Québec et d’Ottawa» montre bien cette vision monolithique.
En tout respect, il faut en finir avec ce fondamentalisme de l’indépendance qui divise et polarise notre nation au lieu de l’unir et de l’apaiser. À cet égard, le Bloc québécois incarne depuis trop longtemps un certain nationalisme sectaire excluant les nationalistes fédéralistes. Empêtré dans sa finalité d’indépendance, il lui est impossible de rassembler tous les nationalistes québécois, encore moins l’ensemble des Québécois(e)s. Pire encore, ces fondamentalistes réussissent même à se diviser entre eux! Le mouvement de Mme Martine Ouellet étant un exemple éloquent.
L’indépendance du Québec ne se fera pas à Ottawa.
Bien que le Bloc québécois se soit récemment lancé dans un projet de refondation, l’indépendance du Québec demeurera leur finalité. Cet exercice de maquillage aboutira au mieux à un nouveau logo et un nouveau nom un peu moins «bloquant»… Et pourtant, au printemps dernier, l’éphémère «Québec debout» avait suscité un vrai espoir. Il n’a suffi que d’un été pour rasseoir tout ce beau monde à leur place…
L’indépendance du Québec ne se fera pas à Ottawa, voilà tout! À moins de trouver du plaisir dans la confrontation, y envoyer des indépendantistes est inutile, voire contre-productif. S’auto-condamner ainsi à une perpétuelle opposition, c’est assurer indéfiniment l’isolement politique du Québec, ce qui est évidemment contraire à ses intérêts.
Des autonomistes à Ottawa pour mieux servir le Québec
On ne connaît que trop bien les diktats martelés depuis 25 ans par les fondamentalistes de l’indépendance, à savoir que le fédéralisme canadien est irréformable, Meech et Charlottetown en étant des preuves indiscutables. Pour eux, toutes tentatives de faire progresser le Québec à l’intérieur du Canada n’est que perte de temps.
Par conséquent, il nous faut attendre, confinés dans une sempiternelle opposition, le grand soir d’une indépendance messianique. Remettre en doute cette sainte Écriture en proposant des solutions potentielles serait perçu comme une attaque contre la finalité indépendantiste. Pourtant, il existe bien des alternatives. René Lévesque parlait de «beau risque», moi je vous parlerai d’autonomisme régional.
L’autonomisme n’est pas un concept nouveau au Québec
Pensons, par exemple, à l’autonomie financière du Québec lorsque Duplessis réussit à rapatrier, en 1954, des points d’impôt du fédéral. Ou encore lorsque Paul Gérin-Lajoie, en 1965, obtint la souveraineté des provinces dans les relations internationales liées à leurs champs de compétences…
Que ce soit au sein du Canada ou comme pays indépendant, il faudra à terme envisager une nouvelle forme d’union canadienne plus émancipatrice pour tous.
Les choses changent, le monde évolue. Croire que le Québec est le seul des peuples canadiens à désirer plus d’autonomie serait une profonde méconnaissance du Canada. Les peuples canadiens ne sont pas hétéroclites et uniformes. Prenons seulement les Britanno-Colombiens qui, de par leur progressivité et leurs valeurs écologiques, sont les seuls ayant réussi à envoyer à Ottawa une députée du Parti vert. Ils pourraient être un allié de premier choix dans une éventuelle coalition d’autonomistes régionaux, surtout dans nos luttes environnementales contre la puissante industrie pétrolière canadienne.
C’est que l’autonomie, c’est bon pour tous les peuples, qu’ils soient québécois, canadiens ou autres. Que ce soit au sein du Canada ou comme pays indépendant, il faudra à terme envisager une nouvelle forme d’union canadienne plus émancipatrice pour tous. Une coalition pancanadienne d’autonomistes pourrait être une nouvelle solution pour y arriver. Cependant, ce n’est pas en envoyant des indépendantistes à Ottawa que ce sera possible. Par contre, avec des autonomistes prônant un nationalisme d’ouverture, alors là, tout devient possible!
Il est facile de se décrire comme une nation victime du fédéralisme canadien et de son statu quo. Ou encore de décrier les caquistes ou les solidaires comme de faux nationalistes… Chers fondamentalistes de l’indépendance, j’espère que ce texte saura initier une remise en question.
Et pour les autres nationalistes, prônant ouverture et unité, seule l’action peut remettre le Québec en marche!